Hors série N°5
Articles parus dans Famille chrétienne, n° 1944 du 18 au 24 avril 2015.
UN MUSULMAN PEUT-IL RENONCER À L’ISLAM ?
Du point de vue musulman, l’islam étant la religion inscrite dans le cœur de l’homme dès la Création, y renoncer pour l’athéisme revendiqué ou pour une autre religion est impensable. La liberté de conscience n’est donc pas reconnue.
Le Coran menace de l’enfer éternel le musulman qui enfreint ce principe. « Quant à celui qui se sépare du Prophète après avoir clairement connu la vraie Direction, et qui suit un chemin différent de celui des croyants : Nous nous détournerons de lui, comme lui-même s’est détourné ; Nous le jetterons dans la Géhenne : quelle détestable fin ! » (4, 115).
Cependant, aucune peine temporelle n’est prévue. Mais cette lacune est compensée par un ordre attribué à Mahomet dans la Sunna : « Celui qui quitte la religion, tuez-le ! »
En vertu de cette sentence, certains Etats musulmans prescrivent la condamnation à mort de celui qui se rend coupable du crime de ridda, concept regroupant l’apostasie de la religion et la trahison de l’Oumma (la nation musulmane). Même lorsqu’aucune peine n’est prévue par la loi, ses proches peuvent se charger eux-mêmes de tuer le « criminel » sans risquer d’être traduits en justice.
Le plus souvent, le musulman qui renonce à sa religion doit se séparer de sa famille, il peut perdre son emploi ou sa nationalité et être obligé de quitter son pays.
UN CATHOLIQUE PEUT-IL RENONCER À SA FOI ?
Le Catéchisme de l’Eglise catholique définit l’apostasie comme « le rejet total de la foi chrétienne » (n° 2089). Cela concerne les chrétiens qui renient leur baptême, soit pour une autre religion, soit pour un agnosticisme ou un athéisme déclaré.
L’apostasie est un péché mortel qui entraîne la peine d’excommunication latae sententiae, et donc l’exclusion de la communion de l’Eglise (Code de droit canonique, n° 1364). Mais l’Eglise n’a pas le pouvoir d’infliger une sanction de type civil ou pénal. Par ailleurs, si elle condamne l’acte, elle reste attentive au salut de son auteur. C’est pourquoi elle s’abstient de tout jugement définitif pour celui qui a renoncé à sa foi. Elle refuse également toute attitude de mépris ou d’humiliation envers l’apostat, persévérant ainsi dans la charité, dans l’espérance de son retour, et alors prête à lui offrir le pardon de Dieu.
La question de l’apostasie soulève le problème de la liberté religieuse. Au concile Vatican II, par sa déclaration Dignitatis humanae, l’Eglise catholique a considéré cette liberté comme la plus importante de toutes, car elle a « son fondement dans la dignité même de la personne humaine telle que l’ont fait connaître la parole de Dieu et la raison elle-même ».
La déclaration conciliaire précise qu’il s’agit d’un droit de nature civile et non de nature morale, tous les hommes étant tenus, d’une part de « chercher la vérité, celle tout d’abord qui concerne la religion », d’autre part d’« adhérer à la vérité dès qu’ils la connaissent » et « de lui être fidèles ». Ce qui compte c’est l’absence de coercition envers la pratique du culte et l’absence de contrainte sur les consciences.
Saint Jean-Paul II a rappelé ce principe dans son encyclique Redemptoris missio :
L’Eglise propose, elle n’impose rien : elle respecte les personnes et les cultures, et elle s’arrête devant l’autel de la conscience » (n° 39).
Annie Laurent