Hors série Islam N°1

Articles parus dans Famille chrétienne, n° 1944 du 18 au 24 avril 2015

L’ISLAM EST-IL UNE RELIGION RÉVÉLÉE ?

« Lis au Nom de ton Seigneur qui a créé ! Il a créé l’homme d’un caillot de sang. Lis ! Car ton Seigneur est le Très-Généreux qui a instruit l’homme au moyen du calame [plume] et lui a enseigné ce qu’il ignorait » (sourate 96, versets 1 à 5).

Bien que ne figurant pas au tout début du Coran – le classement des sourates ne suit ni l’ordre chronologique ni l’ordre thématique -, ce passage est retenu par les commentateurs musulmans comme celui qui inaugure la « descente » (tanzîl) de l’ensemble du Livre « divin ».
Selon la tradition islamique, la scène s’est déroulée en 610. Méditant dans une grotte près de La Mecque, alors cité polythéiste, Mahomet aurait reçu cette injonction de la part de l’ange Gabriel (le Coran ne mentionne sa mission que de manière allusive, cf. 2, 97), à charge pour lui de transmettre à ses compatriotes ce qui lui était dicté en arabe (43, 1-4) selon une progression qui s’acheva avec la mort du « Prophète », en 632. Le Coran se présente comme le « rappel » d’un « pacte primordial » (mîthaq) aux termes duquel Adam accepta la religion de la « soumission », à savoir l’islam (7, 172-173), qui convient à tous les êtres humains (3, 81). Ces derniers s’en étant périodiquement détournés au profit de l’idolâtrie ou l’ayant déformé, Dieu a choisi Mahomet comme « sceau des prophètes » avec la « Révélation » définitive et désormais « infalsifiable ».
Depuis le XIème siècle, le dogme du Coran « incréé », c’est-à-dire préexistant à la création du monde, s’est imposé dans l’islam sunnite, sur la base d’une affirmation « divine » qui le présente comme la copie d’un archétype présent en Dieu : « Il [le Livre] existe auprès de Nous, sublime et sage, dans la Mère du Livre » (43, 4). Dieu y demande aux hommes de croire en Lui et en son unicité ; Il indique le culte qu’il convient de Lui rendre ainsi que la Loi à observer (la charia). Mais Il ne Se révèle pas, en ce sens qu’Il reste « inconnaissable ». Il est transcendant et demeure étranger à ses créatures humaines, ici-bas et dans l’Au-delà. La rédemption est absente de la perspective coranique car celle-ci ignore l’existence du péché originel.
Pour l’apologétique musulmane, la « descente » ayant eu lieu au VIIème siècle prouve que le Coran est l’ultime phase de la Révélation, restauratrice du pur monothéisme. Or, le Livre sacré des musulmans contredit et combat l’essentiel de la doctrine chrétienne, à savoir l’unicité et l’universalité du salut en Jésus-Christ (Cf. la déclaration Dominus Iesus, 2000). Il est donc préférable de considérer l’islam comme une œuvre humaine et de renoncer à voir en lui une religion biblique.

PAS DE NOUVELLE RÉVÉLATION APRÈS LE CHRIST

Contrairement au Coran, la Bible n’est pas une dictée divine. Elle est un recueil de livres inspirés. Rédigés par des hommes en diverses circonstances et sous la motion du Saint-Esprit, ces livres, qui empruntent des formes et des styles variés (récits, commandements, prophéties, psaumes, témoignages, etc.), racontent l’histoire de Dieu avec l’humanité jusqu’à son accomplissement à la fin du monde.

A travers l’Ancien Testament, Dieu se fait pédagogue pour préparer un peuple à accueillir Jésus, le Verbe incarné, événement qui survient à la plénitude des temps pour apporter le salut à tous les hommes, puisque tous sont pécheurs. La notion d’inspiration est essentielle : Dieu ne s’impose pas, Il a voulu avoir besoin des hommes dont Il fait ses partenaires tout en respectant leur liberté. C’est pourquoi Il les appelle et attend leur consentement. Le Fiat de Marie à l’Annonciation est significatif de cette manière divine de procéder.
En outre, par son Incarnation, Dieu se fait connaître. « Qui me voit, voit le Père » (Jn 12, 45). Il dit qui Il est et non seulement ce qu’Il exige de ses créatures. Selon Benoît XVI, « le christianisme est la religion du Dieu qui possède un visage humain » (encyclique Caritas in Veritate, n° 31). Et, par le baptême, le Créateur fait des hommes ses enfants, adoptifs mais non moins réels, en les invitant à vivre dans son intimité ici-bas en attendant la vision béatifique dans l’Au-delà.
Pour attester sa divinité, le Christ a multiplié les signes à travers ses miracles, y compris en dehors des limites du judaïsme, ceci afin de manifester l’universalité de sa mission rédemptrice, comme en témoignent les Evangiles. En Lui, l’Ancien Testament s’est accompli. Tel est l’enseignement traditionnel de l’Eglise, rappelé par Vatican II :

L’économie chrétienne, étant l’Alliance Nouvelle et définitive, ne passera donc jamais et aucune nouvelle révélation publique n’est dès lors à attendre avant la manifestation glorieuse de notre Seigneur Jésus-Christ » (Dei Verbum, n° 4).

Annie Laurent