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Alors que les djihadistes de l’Etat islamique (Daech), d’El-Qaïda, de Boko Haram et d’autres organisations islamistes justifient leurs crimes contre les chrétiens en se référant à leur religion, il est utile de connaître l’enseignement du Coran au sujet des disciples de Jésus-Christ.

Nous vous proposons  donc cette découverte à travers les Petites Feuilles Vertes N° 27 ci-dessus, et 28 suivante . Nous nous sommes volontairement limités ici au Coran, en nous réservant la possibilité de vous présenter cette réalité en fonction d’autres sources islamiques (la Tradition mahomédienne, la charia, etc.).

Critiques doctrinales et des fidèles chrétiens

Le Coran * classe les juifs et les chrétiens parmi les « Gens du Livre » (1), ce qui signifie pour lui que les fidèles du judaïsme et du christianisme ont reçu des Ecritures transmises par Dieu à travers des prophètes : Moïse et la Torah pour les premiers ; Jésus et l’Evangile pour les seconds. Pour l’islam, il s’agit d’ailleurs d’un seul et même Livre. Cependant, les uns et les autres sont accusés d’avoir falsifié la Torah et l’Evangile.

I – CRITIQUES DOCTRINALES

Le Coran considère que les juifs et les chrétiens ont caché, oublié, déformé ou travesti certains éléments de la révélation. La vocation du Coran est donc de leur rappeler ce que Dieu aurait dit aux hommes à l’origine du monde créé.

« Certains (parmi les gens du Livre) altèrent le Livre en le récitant pour faire croire que leurs inventions appartiennent au Livre mais elles sont étrangères au Livre. Ils disent que tout cela vient de Dieu mais cela ne vient pas de Dieu. Ils profèrent des mensonges contre Dieu alors qu’ils savent » (3, 78).
« Parmi ceux qui disent : “Nous sommes chrétiens, nous avons accepté l’alliance“ (2), certains ont oublié une partie de ce qui leur a été rappelé. (…) Ô gens du Livre ! Notre Prophète [Mahomet] est venu à vous. Il vous explique une grande partie du Livre que vous cachiez » (5, 14-15).
«  Ceux auxquels nous avons donné le Livre le connaissent, comme ils connaissent leurs propres enfants. Plusieurs d’entre eux, cependant, cachent la Vérité, bien qu’ils la connaissent » (2, 146).
« Ô gens du Livre ! Pourquoi dissimulez-vous la Vérité sous le mensonge ? Pourquoi cachez-vous la Vérité, alors que vous savez ? » (3, 71).
Ces reproches ont permis aux théoriciens musulmans d’élaborer le concept de « falsification » (tahrîf) des Ecritures.
Envers les juifs, le Coran n’énonce pas de divergences doctrinales mais il leur adresse un certain nombre de reproches : oubli des bienfaits de Dieu (2, 47 et 122), rupture de l’alliance avec Dieu (5, 13), ignorance de l’annonce de la venue de Mahomet (7, 157) et refus de son autorité temporelle (5, 41 et 44 ; 62, 5-7).
En ce qui concerne les chrétiens, deux accusations principales leur sont adressées concernant le Dieu auquel il faut croire :
– La croyance en la Trinité,
– L’identité et la vocation de Jésus.

1°/ La croyance en la Trinité.

« Ô gens du Livre ! Ne dépassez pas la mesure dans votre religion. Ne dites, sur Dieu, que la vérité. (…) Ne dites pas “Trois” ; cessez de le faire ; ce sera mieux pour vous » (4, 171).
« Oui, ceux qui disent : “Dieu est, en vérité, le troisième de Trois” sont impies. Il n’y a de Dieu qu’un Dieu unique » (5, 73).
« Dieu dit : “Ô, Jésus, fils de Marie ! Est-ce toi qui a dit aux hommes : prenez, moi et ma mère, pour deux divinités, en dessous de Dieu” » (5, 116). Ici, le Coran intègre Marie dans cette triade.

2°/ L’identité et la vocation de Jésus.

Pour le Coran, Jésus (Issa) n’est qu’un prophète (5, 75) et qu’une créature humaine : « Oui, il en est de Jésus comme d’Adam auprès de Dieu : Dieu l’a créé de terre, puis il lui a dit : “Sois”, et il est » (3, 59).
« Dieu est unique ! Gloire à lui ! Comment aurait-ils un fils ? » (4, 171).
« Ils ont attribué un fils au Miséricordieux ! Il ne convient pas au Miséricordieux de se donner un fils » (19, 91-92).
« Ceux qui disent : “Dieu est, en vérité, le Messie, fils de Marie” sont impies » (5, 17).
« Les chrétiens ont dit : “Le Messie est fils de Dieu !” Telle est la parole qui sort de leurs bouches ; ils répètent ce que les incrédules disaient avant eux. Que Dieu les anéantisse ! Ils sont tellement stupides ! » (9, 30).
Dans le Coran, le mot « Messie » appliqué à Jésus n’est qu’un titre d’honneur ; il n’a pas le sens rédempteur que lui donnent les chrétiens. De même, le Coran ne désigne jamais Jésus comme le « Christ » (l’Oint du Seigneur).
Selon l’Islam les chrétiens ont donc tort de croire que Jésus est le fils de Dieu et de l’adorer.
Le Coran reproche aussi aux chrétiens ne pas accueillir Mahomet, prophète annoncé par Jésus. « Jésus, fils de Marie, dit : “Ô fils d’Israël ! Je suis, en vérité, le prophète de Dieu envoyé vers vous (…) pour vous annoncer la bonne nouvelle d’un Prophète qui viendra après moi et dont le nom sera Ahmed » (61, 6). Ahmed signifie « le loué ». Ce nom est employé pour désigner Mahomet.

II/ SAINT PAUL, LE FALSIFICATEUR

Pour beaucoup d’auteurs musulmans, Jésus est innocent des falsifications imputées aux chrétiens. Ce sont ses disciples qui ont opéré ces déformations. Saint Paul est souvent accusé d’être le principal « falsificateur » de l’Evangile.

Pour ne citer qu’un exemple, sous la plume de Si Hamza Boubakeur(3) dans son Traité moderne de théologie islamique :

La métamorphose du christianisme s’est réalisée grâce aux écrits et au prosélytisme de Paul, celui-là même qu’on avait naguère accusé de duplicité. […] C’est donc après une transformation interne de la doctrine de Jésus devenue doctrine paulinienne que les Evangiles qui normalement auraient dû la précéder, ont pu être composés, soit plus de trois quarts de siècles après le rappel du Christ à Dieu » (p 96-97).
Il s’agit là d’affirmations gratuites et arbitraires, dénuées de tout fondement.

III – REGARDS CORANIQUES SUR LE CLERGÉ CHRÉTIEN

Le Coran associe les « déviations » des chrétiens envers Jésus à leur rapport avec le clergé dont le rôle est exagéré.
« Ils ont pris leurs docteurs et leurs moines ainsi que le Messie, fils de Marie, comme seigneurs, au lieu de Dieu. Mais ils n’ont reçu l’ordre que d’adorer le Dieu unique : il n’y a de Dieu que lui ! Gloire à lui ! A l’exclusion de ce qu’ils lui associent » (9, 31).
Les hommes de religion chrétiens ont donc outrepassé ce que Dieu attend d’eux et n’ont pas été fidèles à leurs engagements.
Ils sont accusés d’exploiter et de tromper les vrais croyants, c’est-à-dire les musulmans. « Ô vous qui croyez ! Beaucoup de docteurs et de moines mangent en pure perte les biens des gens et ils écartent ceux-ci du chemin de Dieu » (9, 34).
Ce reproche est élargi à tous les chrétiens. « Dis : “Ô gens du Livre ! Pourquoi détournez-vous le croyant de la voie de Dieu et voudriez-vous la rendre tortueuse, alors que vous êtes témoins ? – Dieu n’est pas inattentif à ce que vous faites – Ô vous [musulmans] qui croyez ! Si vous obéissez à certains de ceux qui ont reçu le Livre, ils vous rendront incrédules, après que vous aurez eu la foi » (3, 99-100).
Cependant, un verset revient sur les qualités des hommes de religion chrétiens.
« Tu constateras que les hommes les plus proches des croyants [musulmans] par l’amitié sont ceux qui disent : “Oui, nous sommes chrétiens !” parce qu’on trouve parmi eux des prêtres et des moines qui ne s’enflent pas d’orgueil » (5, 82).
Ce verset, dit « de l’amitié », est souvent cité par les musulmans soucieux de montrer aux chrétiens la considération que le Coran leur porte. Cependant, cette considération est conditionnée par l’adhésion de ces mêmes chrétiens à l’islam, comme le montre le verset 83 qui suit immédiatement 5, 82 : « Tu vois leurs yeux déborder de larmes lorsqu’ils entendent ce qui est révélé au Prophète, à cause de la vérité qu’ils reconnaissent en lui. Ils disent : “Notre Seigneur ! Nous croyons ! Inscris-nous donc parmi les témoins” » (5, 83).

Tous les griefs envers les juifs et les chrétiens sont récapitulés dans la Fâtiha (l’Ouverture), première sourate du Coran. Centrale dans la pratique religieuse islamique, cette courte sourate est récitée plusieurs fois par jour par les musulmans pieux. Ceux-ci demandent à Dieu de les garder fidèles à l’islam et de leur éviter de suivre la voie des juifs et des chrétiens. « Dirige-nous dans le chemin droit : le chemin de ceux que tu as comblés de bienfaits ; non pas le chemin de ceux qui encourent ta colère ni celui des égarés » (1, 6-7).

Annie Laurent

PFV N° 27
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* Nous utilisons ici la traduction de Denise Masson (Le Coran, Folio-Gallimard).
(1) L’Eglise récuse la formule « gens du Livre ». « La foi chrétienne n’est pas une “religion du Livre”. Le christianisme est la religion de la “Parole” de Dieu, “non d’un verbe écrit et muet, mais du Verbe incarné et vivant” » (Catéchisme de l’Eglise catholique, n° 108).
(2) L’alliance dont il est question n’est pas celle de la Bible où Dieu fait alliance avec l’humanité à travers Abraham. Il s’agit du « pacte primordial » (mîthâq). Celui-ci consiste en l’acceptation, d’abord par Adam (3, 81) puis par ses descendants (7, 172-173), de la « religion de la soumission » (l’islam) voulue par Dieu.
(3) Si Hamza Boubakeur est Algérien, père de l’actuel recteur de la Grande-Mosquée de Paris et auteur d’un Traité moderne de théologie islamique (éd. Maisonneuve & Larose, 1993).


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