Hors série Islam N°3
Articles parus dans Famille chrétienne, n° 1944 du 18 au 24 avril 2015.
LE CORAN ENSEIGNE-T-IL LA HAINE DES JUIFS ET DES CHRÉTIENS ?
« Ô vous qui croyez ! Ne prenez pas pour alliés les juifs et les chrétiens. Ils sont alliés entre eux et si vous les prenez pour alliés, vous deviendrez un des leurs » (Coran 5, 51).
Plutôt que la haine, c’est la méfiance que l’islam enseigne envers les juifs et les chrétiens. Cette méfiance repose, pour les juifs, sur la réprobation de leur attitude envers Mahomet et ses disciples et, pour les chrétiens, sur la condamnation de leurs croyances, notamment la Sainte Trinité.
La position du Coran reflète l’expérience de Mahomet avec les uns et les autres. Le judaïsme et le christianisme étaient en effet répandus dans la Péninsule arabe au VIIème siècle. Le Livre sacré des musulmans contient d’ailleurs des personnages et des épisodes bibliques mais ceux-ci ont été islamisés, y compris Abraham dont le Coran dit qu’il « n’était ni juif ni chrétien, mais monothéiste pur » (3, 67). Juifs et chrétiens ont bien reçu le « Livre de Dieu », d’où le nom de « gens du Livre » qui leur est attribué, mais ils ne lui ont pas été fidèles, en occultant notamment l’annonce de la venue de Mahomet qui aurait été inscrite dans la Torah et l’Evangile et en déformant le message divin sous l’inspiration des démons.
« Ô détenteurs de l’Ecriture ! Pourquoi travestissez-vous la vérité au moyen d’un faux ? » (3, 71). De ce reproche est née la doctrine de la falsification (tahrîf).
Le grief contre les juifs concerne aussi leur refus de se soumettre à l’autorité temporelle de Mahomet, ce qui leur vaut d’être tombés en disgrâce aux yeux de Dieu (5 14 et 18). Quant aux chrétiens, leur monothéisme est altéré par l’« associationnisme » (divinisation de Jésus et de Marie) (9, 31), seul péché irrémissible (5, 73).
Certes, les disciples de Jésus bénéficient d’une sympathie qui n’est pas accordée aux juifs. « Tu constateras que les hommes les plus hostiles aux croyants sont les juifs et les polythéistes. Tu constateras que les hommes les plus proches des croyants par l’amitié sont ceux qui disent : “Oui, nous sommes chrétiens ” parce qu’on trouve parmi eux des prêtres et des moines qui ne s’enflent pas d’orgueil » (5, 82).
Mais la suite du verset conditionne aussi cette sympathie à leur adhésion à l’islam (5, 83). En définitive, les fidèles des deux religions doivent se soumettre au statut humiliant de la dhimmitude dans les pays gouvernés par l’islam (9, 29) avant d’être anéantis par Dieu à cause de leur « stupidité » (9, 30).
L’ATTITUDE DE L’ÉGLISE ENVERS LES NON-CHRÉTIENS
« Celui qui n’aime pas n’a pas connu Dieu, car Dieu est Amour » (1 Jn 4, 8). La vraie connaissance de Dieu passe par l’accueil de la Révélation qu’Il a faite gratuitement aux hommes et par l’imitation du Verbe incarné.
L’amour de Dieu envers ses créatures n’étant pas sélectif mais offert à tous, les chrétiens sont invités à suivre le précepte du Christ : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés » (Jn 13, 34). Pour Lui, qui a voulu se faire le frère des hommes (Rm 9, 29), la notion de « prochain » n’est pas réservée à ceux qui sont proches par la religion, la nationalité, la parenté ou le voisinage ; elle est universelle et ne doit donc exclure personne, même pas les ennemis.
« Aimez vos ennemis et priez pour ceux qui vous persécutent » (Mt 5, 43). Jésus Lui-même a donné l’exemple sur la Croix en priant son Père de pardonner à ceux qui le mettaient à mort. A sa suite, une multitude de martyrs l’ont imité et continuent de le faire. C’est d’ailleurs cette attitude qui signe l’authenticité du martyre chrétien.
Aimer les autres, quelles que soient leurs croyances, est également une exigence de la foi chrétienne. Rien dans le Nouveau Testament et dans l’enseignement de l’Eglise ne peut justifier le rejet, le mépris, voire la haine, de ceux qui ne croient pas en Jésus-Christ et/ou ne sont pas baptisés. Cet impératif de charité n’exclut pas la nécessité d’une approche lucide, clairvoyante et prudente des doctrines qu’ils suivent.
Car, selon saint Paul, « la charité met sa joie dans la vérité » (1 Co 13, 6). C’est pourquoi l’Eglise met ses fidèles en garde contre l’indifférentisme et le syncrétisme religieux.
Annie Laurent