Après le hidjab
(foulard serré sur les cheveux, les oreilles et le cou), puis le niqab et la burqa (voile intégral, couvrant tout le corps, y compris le visage), voici la France confrontée au burkini. Le nom de ce maillot de bain confectionné dans un tissu synthétique élastique, facile à sécher, vient de la contraction des mots burqa et bikini. Le plus souvent, il est composé d’au moins deux pièces, un pantalon et une tunique à manches courtes ou longues, parfois complétées par une capuche pouvant couvrir la tête et le cou, le visage restant découvert. Un nombre croissant de musulmanes revêt cette tenue pour se rendre à la plage ou à la piscine.
Le burkini
est une invention récente qui remonte à 2004. Sa créatrice, Aheda Zanetti, une Australienne d’origine libanaise, musulmane épouse d’un Grec, l’a d’abord cousu elle-même pour un petit cercle d’acheteuses dans son entourage. Elle en a ensuite élargi la commercialisation, fondant pour cela la société Ahiida, qui diffuse aussi sa production dans des magasins sans référence islamique, comme Marks & Spencer. Depuis 2008, date à laquelle l’Union européenne a accordé une protection juridique à la marque Burqini, A. Zanetti assure avoir vendu 700 000 maillots islamiques à travers le monde, comme elle l’a déclaré au quotidien beyrouthin L’Orient-Le Jour du 19 août, précisant que « ces trois derniers mois, les ventes en France ont augmenté de 40 % ».
Avant de proposer le burkini à la vente, sa créatrice a demandé et obtenu une fatoua (avis religieux) attestant sa conformité avec la charia (loi islamique). Ce certificat lui a été délivré par le cheikh Taj Aldin El-Hilali, alors grand-mufti d’Australie et coutumier de déclarations polémiques sur les femmes.
La licéité et la légitimité de ce costume ne font cependant pas consensus dans le monde musulman.
Ainsi, au Maghreb, où le port du burkini se répand comme partout ailleurs, ce qui suscite de vifs débats, il est interdit sur certaines plages ou piscines publiques. En France aussi, les avis divergent. Les salafistes le jugent « impudique » car, mouillé, il fait ressortir les formes. Quant au Conseil français du Culte musulman, sans se prononcer sur le fond, il revendique une liberté totale de porter cette tenue, au nom du respect des consciences, récusant toute association avec l’islam radical.
Cependant, si aucun texte sacré islamique ne mentionne le burkini – nouveauté oblige -, celui-ci, comme tous les styles de « voiles », ne peut se réduire à une prescription religieuse. Il correspond aussi, et de manière inséparable, au regard que la culture mahométane porte sur les femmes et sur leur place dans la société.
Pour Leïla Babès, sociologue française d’origine algérienne,
le mot d’ordre est le suivant : le corps de la femme est objet de désir sexuel, elle doit donc le voiler pour assurer la tranquillité des hommes » (1).
En fait, le burkini permet aux femmes de se mêler aux baigneurs, musulmans ou non, ce que la prohibition de toute mixité entre adultes empêche autrement. C’est pourquoi il est parfois présenté comme un progrès au bénéfice des femmes.
Son développement actuel a aussi un sens politique. Symbole d’affirmation identitaire, il est au service d’une stratégie conquérante qui se nourrit des faiblesses de la civilisation européenne et de son ignorance de l’Islam.
Ne soyons pas naïfs : le voile est un étendard de l’islamisme ! »,
déplorait récemment un Français d’origine algérienne, Rafik Smati, président du mouvement Objectif France (2).
Annie Laurent
Article paru dans L’Homme nouveau, n° 1621 du 10 septembre 2016
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- Le voile démystifié, Bayard, 2004.
- Site Nouvelles de France, 27 avril 2016.