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Josselin Monclar, Paradis perdus, L’Editeur, 2016, 313 p., 19 €.

 

Présenté comme un roman, cet ouvrage est en fait un récit dans lequel l’auteur plonge ses lecteurs au cœur de la société libanaise, qu’il fréquente depuis 1992, année de son premier voyage au pays du Cèdre. Et c’est en outre là-bas qu’il a rencontré Nathalie, catholique maronite, devenue son épouse. Beyrouth, surtout dans sa partie chrétienne, est son lieu de prédilection. J. Monclar est fasciné par cette capitale si étonnante, non seulement par son style désordonné, mais surtout par l’attachement à la vie et la générosité de ses habitants qui savent se dépasser dans l’adversité, comme il en a été si souvent le témoin.

L’évocation de la guerre parcourt le livre. Avec raison, les amis de l’auteur refusent de qualifier de civile ce qui était en réalité une tentative du voisinage d’en finir avec l’exception représentée par ce petit Liban, lequel, grâce à la France, échappait à l’humiliante dhimmitude imposée aux chrétiens des autres pays du Levant où les identités confessionnelles priment sur la citoyenneté. Ce trait est souligné avec force.

De la France, il est beaucoup question. J. Monclar découvre l’amour des Libanais pour notre pays et pour notre langue, mais aussi la souffrance des chrétiens lorsque leur « tendre mère », cédant au reniement d’elle-même, de son histoire et de sa foi, les abandonna, faisant d’eux des « orphelins inconsolables ».

L’ouvrage s’interroge aussi sur le bienfondé de la formule libanaise, si souvent présentée comme un message. Mais quel sens faut-il donner à ce concept ? En d’autres termes, le Liban islamo-chrétien est-il un modèle assez valable pour être imité par un Occident de plus en plus multiculturel ou bien délivre-t-il un avertissement contre une dangereuse illusion ? La conclusion du livre, qui met en évidence la montée de l’islamisme et le déclin des chrétientés orientales, penche vers la deuxième définition. Un livre sensible, lucide et riche d’enseignements.

 

Annie Laurent

Article paru dans La Nef n° 284 – Septembre 2016