Article paru dans La Nef n° 299, janvier 2018
Esther Benfredj, Ismaël contre Israël, genèse du conflit israélo-arabe, Desclée de Brouwer, 2017, 251 p., 18, 90 €.
Juriste et politologue, Esther Benfredj propose une lecture inhabituelle, assortie de substantielles annexes, des événements qui meurtrissent le Proche-Orient.
Procédant étape par étape, elle montre qu’une entente entre Juifs et Arabes a d’abord été envisageable.
Jusqu’au XXe siècle, la Palestine et Jérusalem ne présentaient qu’un intérêt secondaire pour l’islam et le nationalisme arabe. Ainsi, dans l’accord qu’il conclut en 1919 avec le dirigeant sioniste Haïm Weizmann, en marge de la Conférence de la paix, le prince Fayçal d’Arabie acceptait la création d’un Etat juif. Mais, suite au refus des participants au Congrès de Damas, tenu peu après, Fayçal revint sur son engagement.
Du point de vue musulman, les juifs, voués à la dhimmitude par le Coran, ne pouvaient prétendre gouverner une « terre d’islam ». « Ce refus fut à l’origine de la première guerre israélo-arabe de 1948-1949 », note l’auteur.
Pour elle, tous les efforts diplomatiques entrepris depuis lors, le plus souvent sous l’égide des Etats-Unis, ont échoué parce que le concert des nations relayés par les médias ont forgé l’image d’un Israël incarnant le puissant Goliath tandis que les Palestiniens représentent le faible David.
Ainsi, l’Etat hébreu devient le bouc émissaire des malheurs qui affectent le Proche-Orient (est-ce pourquoi les injustices infligées aux Palestiniens sont occultées ?).
Il y a du vrai dans cette analyse qui souligne des aspects religieux rarement pris en compte mais, précisément pour cette raison, on peut regretter le silence de l’auteur sur les positions de l’Eglise et le sort des chrétiens de Terre sainte, qui manifeste ainsi une vision plutôt unilatérale de cet interminable conflit.
Annie Laurent