Marie-Thérèse et Dominique Urvoy, La mésentente. Dictionnaire des difficultés doctrinales du dialogue islamo-chrétien, Cerf, 352 p., 24 €.
Depuis qu’elle existe, l’Eglise a toujours dialogué avec les non-chrétiens : comment aurait-elle pu autrement leur annoncer l’Evangile ? Le concile Vatican II s’est inscrit dans cette continuité, en apportant toutefois une double nouveauté à cette démarche. Pour tenir compte du contexte actuel, notamment celui de la mondialisation, il a approfondi le sens théologique du dialogue interreligieux et l’a doté d’institutions appropriées. Contrairement à ce qui a été souvent compris par les catholiques, il ne s’agit donc pas d’une rupture avec le passé.
Il faut bien admettre cependant que le dialogue avec les musulmans comporte des difficultés spécifiques que les Pères conciliaires n’avaient sans doute pas envisagées. Ces problèmes résultent des convergences apparentes, au moins dans les mots et les noms de personnages, qui peuvent donner à croire aux chrétiens que l’islam s’apparente à leur religion. Cela entraîne des confusions et des ambiguïtés, aggravées, du côté chrétien, par le pacifisme, l’affectivité et l’indifférentisme religieux qui caractérisent notre époque. Les chrétiens sont, en outre, confrontés à certains obstacles du côté de leurs interlocuteurs musulmans : manque de représentativité, aptitude à pratiquer l’esquive sur les questions dérangeantes, méfiance envers la gratuité chrétienne.
Alors que le dialogue islamo-chrétien est devenu une sorte de système privé de sa finalité (notamment l’évangélisation et le salut des musulmans), les auteurs de cet ouvrage, islamologues reconnus, proposent une relecture de cinquante thèmes abordés dans les rencontres entre membres des deux religions. Ils ont choisi les plus essentiels, ceux qui touchent au cœur de la foi, des textes sacrés, de l’homme et de l’organisation sociale, dépouillant pour cela une grande quantité de livres, de revues, de comptes-rendus de réunions.
Ce dictionnaire se présente comme un outil très sérieux au service de la clarté. A ce titre, il mérite une réelle attention.
Annie Laurent