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Tag Archive for: taqiya

PFV n°53 : Présentation du livre de Annie Laurent : « L’islam, pour tous ceux qui veulent en parler »

21 Déc 2017 / 0 Commentaires / dans Bibliothèque, Petite Feuille Verte/par Clarifier

 

 

En cette fin d’année, nous voulons vous rappeler l’importance d’un livre paru en avril dernier sous la signature d’Annie Laurent : L’Islam pour tous ceux qui veulent en parler (mais ne le connaissent pas encore), éditions Artège. Cet ouvrage, qui reprend d’une manière thématique et ordonnée l’ensemble des Petites Feuilles vertes publiées jusqu’au début 2017, a fait l’objet de nombreux commentaires très favorables.

Pour n’en citer qu’un ici, je retiens la formule de Jean Sévillia : « Un chef-d’œuvre de pédagogie » (Le Figaro Magazine, 17 novembre 2017).

Pour sa part, l’historienne et écrivain Anne Bernet a consacré à l’essai d’A. Laurent une recension exhaustive, publiée dans la revue trimestrielle Sedes Sapientiae (n° 141, septembre 2017). Compte tenu de l’intérêt de cet article, nous vous l’envoyons après avoir obtenu l’accord de son auteur et de l’éditeur de ladite revue, non sans l’avoir scindé en deux pour alléger votre lecture. Vous trouverez donc ci-joint la première partie (PFV n° 53) ; la seconde (PFV n° 54) vous sera adressée en janvier 2018.

Bonne lecture et  Bon et Joyeux Noël.


 

 Présentation du livre d’Annie Laurent, L’Islam, pour tous ceux qui veulent en parler (mais ne le connaissent pas encore), éd. Artège, 2017, par Anne Bernet (1).

 

Que cela nous plaise ou non,

l’islam a fait irruption dans notre monde, notre société, notre vie. Au cours des dernières décennies, il a, par le biais d’une immigration toujours plus forte, pris en Europe une importance jadis inimaginable et une visibilité parfois provocante. Il n’est plus guère de jour qui ne soit marqué par un acte de terrorisme revendiqué par des islamistes. Le djihad se mène désormais chez nous et contre nous.

Face à cette situation, une majorité de Français reste désemparée, déconcertée, parce que sans repères pour comprendre les événements. Pouvoirs publics, gouvernants, médias n’ont à offrir en guise de réponses à leurs questions, de remèdes à leurs inquiétudes, que des discours convenus, cent fois entendus, qui paraissent de plus en plus tragiquement en porte-à-faux avec la réalité quotidienne.

En fait, tenir un discours clair sur l’islam,

proposer une analyse lucide des problèmes provoqués par son apparition dans nos sociétés s’avère difficile, voire impossible, que ce soit par ignorance, angélisme béat, crainte d’être accusé de racisme ou d’islamophobie. Ce choix, qui s’apparente à la politique de l’autruche, ne peut, à terme, qu’exacerber les tensions et interdire d’apporter des solutions pacifiques aux crises en train de se nouer.

Dans ce contexte qui devient dramatique, la publication du dernier essai d’Annie Laurent, spécialiste incontestée du Proche-Orient, du monde islamique et des rapports douloureux entre chrétiens et musulmans dans ces régions, est un événement capital. Voici, en effet, enfin mise à la portée du grand public, une analyse sans concession quoiqu’emplie de charité chrétienne des réalités de l’islam. Voici le livre qu’il faut lire, toutes affaires cessantes.

Au commencement de ce travail,

il y a une association, Clarifier, dont le nom dit suffisamment les buts, qu’Annie Laurent a créée avec d’autres. À travers des conférences, des rencontres, des publications, « les Petites Feuilles vertes », le vert étant la couleur de l’islam, Clarifier dispense sur l’enseignement de Mahomet tout ce qu’il est nécessaire de savoir pour respecter les musulmans sans s’aveugler sur leur foi ni sur les objectifs politiques et sociétaux qui vont de pair avec leur religion.

Jusque-là disponibles par abonnement, ces feuillets, en fait de véritables dossiers de fond exposant les origines de l’islam, son histoire, ses dissidences, ses courants, ses lois, sa pensée, ses façons d’être et d’agir, ses stratégies, sa vision politique, ses perspectives d’avenir, viennent d’être réunis en volume.

Au lecteur qui possède déjà quelques lumières sur l’islam,

ce livre permettra d’ordonner ses connaissances et de les approfondir ; à celui qui ne sait rien, ou uniquement ce qu’il entend répéter par la presse et les politiques, il ouvrira des perspectives neuves. Dérangeantes ? Sûrement, et il faut admirer le courage d’Annie Laurent qui ne craint pas d’affronter la bien-pensance ambiante.

Il existe en effet un discours préfabriqué, convenable, sur l’islam, ressassé ad nauseam en toutes occasions ; il cherche à démontrer que l’enseignement de Mahomet est comparable aux autres grands monothéismes, lesquels, au demeurant, auraient eu, eux aussi, leurs parts d’ombre et de violence. L’islam serait une religion de paix et d’amour, ceux qui s’en prévaudraient pour couvrir des actes terroristes et criminels seraient de mauvais musulmans, mal formés, mal éduqués, et non représentatifs de leur communauté. Il serait donc loisible de chercher à éradiquer ces formes déviantes de l’islam tout en réservant le meilleur accueil au « véritable » islam.

D’emblée, Annie Laurent réfute ce pieux mensonge.

Il n’y a pas deux islam, un bon et un mauvais, mais un seul qui, selon les circonstances, le contexte, les époques, selon qu’il est en position de force ou de faiblesse, a ou non les moyens de s’imposer par la violence et la coercition.

L’islam, en effet, ne relève pas, à l’instar des autres croyances, du seul for intérieur. Il est aussi et d’abord un projet de vie et de civilisation universel, destiné, selon Mahomet, à s’imposer à l’humanité entière, qu’elle choisisse d’y adhérer spontanément ou qu’elle y soit contrainte.

Perdre de vue cet objectif final, c’est ne rien comprendre aux enjeux. À la différence du christianisme, qui appelle à la conversion, l’islam conquiert. Ceux qui lui résistent doivent donc, en toute logique, disparaître (2) ; les anéantir est œuvre pie. Ne restent alors, hormis le choix du martyre, que deux issues : devenir musulman, ce qui de tous temps est apparu hautement préférable aux  populations conquises, en raison des nombreux avantages procurés aux nouveaux croyants, et cela explique la disparition presque totale, en très peu de temps, des antiques chrétientés d’Orient et d’Afrique du Nord ; ou « la protection », qui permet aux « idiots utiles » de vanter « la tolérance » de l’islam envers les autres croyances et d’exalter un « vivre ensemble » présenté comme un idéal à atteindre, alors qu’il s’agit en réalité de l’instauration d’un statut inférieur, la « dhimmitude », des chrétiens et des juifs, tolérés dans leurs propres patries mais traités en citoyens de seconde zone (3), tels les Coptes égyptiens ou les Chaldéens, pour ne citer qu’eux, du moins tant qu’ils persévèrent dans « leur mécréance », d’ailleurs à leurs risques et périls, ainsi que l’actualité le prouve d’abondance …

Face à cette réalité ancrée dans l’histoire,

tout dialogue trouve vite ses limites et ce pour une excellente raison : les concepts sur lesquels est bâtie notre civilisation occidentale ne signifient à peu près rien pour des musulmans conséquents. Notre modèle, spécialement aujourd’hui, alors que nous offrons à ces observateurs étrangers peu bienveillants un spectacle de décadence morale scandaleuse, n’est pas enviable mais répugnant et haïssable.

L’Europe en général et la France en particulier apparaissent méprisables et méritent un châtiment, que certains extrémistes sont prêts à leur infliger. Le problème étant que, même si ceux-ci représentent une minorité fanatisée, ils ne sont pas condamnés par la majorité de leurs coreligionnaires, soit par solidarité, soit par crainte.

Tout discours contraire, sauf rares exceptions non représentatives de l’opinion publique musulmane, relève d’une stratégie bien connue des musulmans minoritaires : la taqiya, ou dissimulation, qui permet au fidèle en position de faiblesse de mentir afin de survivre en milieu hostile. En réalité, et l’actualité le rappelle fréquemment, avec les passages à l’acte de musulmans que leurs relations présentent comme des modèles d’intégration dont rien ne laissait soupçonner « la radicalisation », peu de choses suffisent pour transformer des gens qui semblaient occidentalisés en ennemis sanguinaires des populations qui les ont accueillis, et souvent élevés.

S’appuyant sur les témoignages de chrétiens d’Orient, persécutés, torturés, massacrés par des gens avec lesquels ils ont toujours vécu, Annie Laurent le rappelle : le Coran interdit strictement l’amitié entre ses fidèles et les « gens du Livre » (4) ; il ne faut donc pas s’étonner de voir le voisin que l’on pensait proche se métamorphoser soudain en bourreau. Pour lui, il n’y a là rien de condamnable. Ceux qui affirment le contraire se trompent, ou ils mentent. Sciemment.

(à suivre).

 

____

  • Sedes Sapientiae, n° 141, septembre 2017, p. 96-103.
  • L’on peut ainsi se référer au verset communément dit « du sabre » : « Après que les mois sacrés se seront écoulés, tuez les polythéistes, partout où vous les trouverez. Capturez-les, assiégez-les, dressez-leur des embuscades. Mais, s’ils se repentent, s’ils s’acquittent de la prière, s’ils font l’aumône, laissez-les libres» (9, 5).
  • « Combattez : ceux qui ne croient pas en Dieu et au Jour dernier ; ceux qui ne déclarent pas illicite ce que Dieu et son prophète ont déclaré illicite ; ceux qui, parmi les gens du Livre, ne pratiquent pas la vraie religion. Combattez-les jusqu’à ce qu’ils paient le tribut après s’être humiliés » (9, 29).
  • « Ne prenez pas pour amis les juifs et les chrétiens. Ils sont amis entre eux. Celui qui les prend pour amis finit par être des leurs. Dieu ne guide pas le peuple injuste » (5, 51).

PFV n°33 : La taqiya ou dissimulation

06 Nov 2015 / 0 Commentaires / dans Petite Feuille Verte/par Clarifier

le 6 novembre 2015

Un terme revient de plus en plus souvent lorsqu’on évoque les spécificités de l’islam. Il s’agit du mot taqiya, qui est généralement traduit par « dissimulation ». Celle-ci autoriserait les musulmans en position d’infériorité à taire leurs convictions religieuses ou à s’adapter provisoirement à des sociétés régies par des systèmes de droit non islamiques. Certains se demandant si un tel comportement repose sur des prescriptions émises dans les textes sacrés de l’islam, nous avons jugé utile de faire le point sur cette question délicate.

Tel est le sujet de la Petite Feuille Verte n° 33 que nous vous adressons.



La Taqiya ou Dissimulation

L’islam interdit formellement aux musulmans de renoncer à leur religion, sous peine de châtiments divins et de malédictions éternelles (cf. Coran 2, 217 ; 3, 87 ; 4, 115 et 16, 106). Les musulmans ne peuvent donc en principe dissimuler leur identité religieuse et travestir leurs croyances.

Cependant, le Coran et la Tradition prophétique (Sunna) ouvrent la voie à des dérogations quant au caractère absolu de la croyance dans le Dieu de l’islam et surtout quant à l’obligation de son attestation publique, ainsi qu’à l’observance du culte ou de la loi islamique (charia). De tout temps et selon des formes variées, des oulémas (docteurs de la Loi) ont légitimé la pratique de la taqiya (dissimulation) que l’on appelle aussi ketman (secret ou restriction mentale). Ces agissements se sont manifestés en diverses circonstances historiques et retrouvent une certaine actualité de nos jours.

I – LES SOURCES CORANIQUES

Le Coran contient deux passages sur lesquels s’appuient les théoriciens de la taqiya. Ils correspondent à deux types de situations particulières.

1°/ « Celui qui renie Dieu après avoir eu foi en Lui – excepté celui qui a subi la contrainte et dont le cœur reste paisible en sa foi -, ceux dont la poitrine s’est ouverte à l’impiété, sur ceux-là tomberont le courroux de Dieu et un tourment terrible » (16, 106).
Dans ce verset, pour notre sujet, c’est l’incise qui compte (souligné). La taqiya est donc autorisée en cas de contrainte extérieure, quelle qu’en soit la forme : persécution, menace sur la vie, absence de liberté religieuse (de conscience et de culte), etc.
2°/ « Que les croyants ne prennent pas pour alliés des infidèles au lieu de croyants. Quiconque le fait contredit la religion d’Allah, à moins que vous ne cherchiez à vous protéger d’eux. Allah vous met en garde à l’égard de Lui-même. Et c’est à Allah le retour. Dis : Que vous cachiez ce qui est dans vos poitrines ou bien que vous le divulguiez, Allah le sait. Il connaît tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. Allah est omnipotent » (3, 28-29).

Deux membres de phrases sont importantes (soulignés). Comme ailleurs dans le Coran, Dieu recommande ici aux musulmans (eux seuls sont qualifiés de « croyants ») de ne pas entretenir de relations d’amitié ou de sujétion avec les non-musulmans (cf. 3, 118 ; 5, 51 ; 9, 23 ; 60, 13), mais il autorise des dérogations au principe lorsque le fait de s’opposer à ces derniers les met en danger. La sécurité ou le besoin de se faire accepter priment alors sur l’affirmation de la religion. En fait, dans ces situations, ce qui compte c’est l’intention du musulman ou la réalité intime de sa croyance. Peu importe alors la profession de foi publique puisque Dieu connaît les dispositions des cœurs et les pensées.
Telles sont les sources qui fondent la doctrine de la dissimulation, en matière de religion et de tout ce qui peut lui être connexe. La validité du recours à la taqiya a été confirmée et précisée par les oulémas (docteurs de la Loi) dès les débuts de l’islam, notamment par Tabarî (m. 923).

Il en résulte qu’un musulman peut abjurer extérieurement ses croyances, professer publiquement une autre religion, accepter d’être réputé non-musulman ou renoncer aux exigences cultuelles et législatives conformes à l’islam, tout cela s’il se trouve dans des conditions qu’il estime être de contrainte justifiant une telle attitude. Si l’on veut comparer avec la position chrétienne sur ce sujet, il convient de se référer à une parole de Jésus-Christ dans l’Evangile : « Qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui perdra sa vie à cause de moi et de l’Evangile la sauvera » (Mc 8, 35).

II – APPLICATIONS HISTORIQUES ET CONTEMPORAINES

La taqiya a donc toujours existé dans l’Oumma (la Communauté des musulmans), mais elle s’est d’abord surtout développée en milieu chiite, ceci pour des raisons de nécessité, suite à la « Grande discorde » (Fitna) qui a engendré au VIIè siècle le clivage avec l’islam sunnite (cf. PFV n° 13).

1°/ Dans le chiisme

Depuis cette rupture, les sunnites ont le plus souvent gouverné l’Oumma. Dans ces périodes, les chiites, minoritaires, ont recouru à la taqiya pour défendre leur identité, souvent niée par l’autorité qui les assimilait au sunnisme, ou pour échapper aux persécutions. Les imams chiites ont justifié, et même conceptualisé, cette pratique, qui a dès lors été comprise comme une obligation de conscience, donc comme faisant partie de la religion. Tous les traités chiites contiennent un chapitre spécial, intitulé « Livre de la taqiya ».
Selon Sami Aldeeb Abou-Sahlieh, professeur de droit islamique à l’Université de Lausanne, la tradition chiite rapporte trois cents récits dans ce sens. En voici un aperçu.
« La dissimulation fait partie de ma religion et de la religion de mes ancêtres » ;
« Si tu agis par dissimulation, ils ne pourront rien contre toi. La dissimulation sera une forteresse pour toi et servira de digue entre toi et les ennemis de Dieu qu’ils ne pourront jamais percer. Si tu dis que celui qui abandonne la dissimulation est comme celui qui abandonne la prière, alors tu dis la vérité » ;
« La dissimulation est le meilleur des actes du croyant parce qu’elle sert à le sauvegarder et à sauvegarder ses frères des impies » (Cf. Le secret entre droit et religion, 2004, diffusion Internet).

Henri Lammens (1862-1937), jésuite belge, orientaliste arabisant de renom établi au Liban, a écrit à ce sujet :

 Parmi les adversaires de ses croyances, il [le chiite] peut parler et se conduire comme s’il était un des leurs. En agissant de la sorte, en prêtant, s’il le faut, des faux témoignages et des faux serments, quand l’intérêt de la communauté l’exige, ou simplement un avantage personnel, il croit obéir à l’ordre de l’imam suprême ».

Et de commenter :

Inutile de relever les conséquences morales de cette théorie, de cette loi du secret, laquelle entretient et légitime une perpétuelle équivoque et rend les chiites impénétrables » (L’Islam, croyances et institutions, Imprimerie catholique, Beyrouth, 1943, p. 190-191 ; livre réédité en France aux éditions du Trident).

A l’instar des chiites, les adeptes de confessions dissidentes du chiisme (alaouites, alévis, druzes, ismaéliens) ressortissants d’un califat ou d’un Etat sunnite, parce que minoritaires, ésotériques, considérés comme hérétiques et donc maltraités pour ces motifs, ont le devoir de pratiquer la taqiya pour se protéger, en tant qu’individus et communautés. On retrouve cette situation chez les bahaïs dans la République islamique d’Iran, chiite.
Ces minorités recourent par ailleurs à la taqiya lorsqu’elles ont besoin de légitimer une position dominante qu’elles ont pu acquérir. Ainsi, quand Hafez El-Assad (père de Bachar, l’actuel président syrien), membre de la communauté alaouite, s’est emparé du pouvoir à Damas, en 1970, il a multiplié les gestes destinés à se faire passer pour un musulman orthodoxe aux yeux du monde sunnite (prière rituelle à la Mosquée des Omeyyades à Damas, fatoua de l’imam libanais chiite Moussa Sadr reconnaissant l’appartenance des alaouites à l’islam, construction d’une mosquée à Qardaha, le village natal des Assad, alors que traditionnellement les alaouites ne prient pas dans des mosquées, etc.).
La taqiya existe donc en milieu islamique, et pas seulement en contexte non-musulman.

2°/ Dans le sunnisme

Les musulmans sunnites ne rejettent pas la taqiya, mais elle n’est pour eux qu’une permission. Ils s’appuient sur des enseignements dispensés par certains de leurs oulémas, tel que celui-ci : « El-Chawkani dit que celui qui devient mécréant sous la menace de mort ne commet point de péché si son cœur est tranquille dans la foi » (S.-A. Abou-Sahlieh, op. cit.).

La taqiya a été observée légitimement par les Morisques vivant sous un pouvoir chrétien en Andalousie. Ainsi, en 1504, le mufti Ahmed Ibn Jumaïra publia une fatoua (avis juridique) donnant des consignes précises à ce sujet. Si les chrétiens obligeaient les musulmans à injurier Mahomet, ils devaient le faire en pensant que cette parole était prononcée par Satan. S’ils étaient obligés de boire du vin ou de manger du porc, ils pouvaient le faire mais en sachant que c’était un acte impur et à condition de le condamner mentalement. S’ils étaient forcés de renier leur foi, ils devaient essayer d’être évasifs ; si on les pressait, ils devaient intérieurement nier ce qu’on les obligeait à dire.

De nos jours, les musulmans sont présents sur tous les continents. Vivant en dehors de leurs territoires traditionnels, ils sont donc sur des « terres de mécréance » (Dar el-Kufr) où il leur est permis, voire recommandé, de pratiquer la taqiya, mais sous une autre forme, à titre individuel ou collectif. Il s’agit de s’adapter extérieurement au contexte en respectant les lois, principes et habitudes des pays concernés tant que les circonstances ne sont pas favorables à l’instauration de l’islam comme religion dominante et à la pleine application de la charia.

3°/ L’esquive

L’esquive consiste à utiliser un vocabulaire qui plaît aux Occidentaux pour décrire l’islam comme une religion inoffensive, apportant « la paix, la tolérance et l’amour ». Certaines personnalités musulmanes profitent de l’ignorance de leurs interlocuteurs non musulmans pour faire passer des messages tronqués quant à l’enseignement véritable de l’islam, en particulier sur certains sujets sensibles (violence, liberté de conscience, droits de l’homme, statut de la femme, respect des non-musulmans, égalité entre les hommes, etc.).

Ces personnalités utilisent dans ce but les tribunes qui leur sont ouvertes dans la presse ou même les rencontres de dialogue interreligieux. Il s’agit en fait de rassurer les non-musulmans quant aux valeurs libérales et pacifiques de l’islam, en présentant des comportements moralement inacceptables comme des dérives, des déformations, voire des trahisons de la religion. On peut comparer cette attitude avec la parole du Christ : « Que votre langage soit : “Oui ? oui”, “Non ? non” » (Mt 5, 37).

III – DEUX CÉLÈBRES PRATICIENS DE LA TAQIYA

1°/ Tareq Oubrou

Imam de la grande mosquée de Bordeaux, ancien militant de l’Union des Organisations islamiques de France (UOIF, d’obédience Frères musulmans), Tareq Oubrou préconise pour les musulmans d’Europe l’acceptation d’une « charia de minorité ». Pour lui, « il s’agit de mettre en relation la norme avec la réalité concrète, tout en restant fidèle aux méthodes qui régissent l’application de la charia à la réalité […]. Cela permet l’élaboration d’un canonisme mobile » (Profession imâm, Albin Michel, 2009, p. 37-41).
D’après l’islamologue Dominique Urvoy, cette position est à comprendre comme une application de la taqiya :

Tareq Oubrou adopte constamment cette ligne d’action : il affirme qu’il est possible de tout résoudre ponctuellement par des fatouas ; si une règle démocratique va à l’encontre de la règle islamique, on peut abroger cette dernière momentanément mais on la rétablira le jour où… On met les choses en veilleuse, mais il s’agit bien de les réactiver tôt ou tard, et cela parce que le Coran est considéré comme étant la parole incréée de Dieu ; par exemple, le djihad, auquel les musulmans doivent renoncer quand ils vivent en Occident, ou auquel ils doivent donner une dimension exclusivement intérieure, mais qu’ils ont le devoir de rétablir dès que cela sera possible » (« La place du secret dans la pensée religieuse musulmane », in L’Islam en France, hors-série de la revue Cités, PUF, 2004, p. 646).

2°/ Tariq Ramadan

Un jugement identique peut être porté sur les positions de Tariq Ramadan, universitaire suisse d’ascendance égyptienne, petit-fils par sa mère de Hassan El-Banna, le fondateur des Frères musulmans. Ramadan joue habilement, dans ses livres et ses conférences, sur certains concepts et mots familiers aux Européens. En voici deux exemples.

  1. Le « réformisme », qui évoque en Occident la modernisation de la pensée, est le plus souvent compris dans l’Islam comme l’islamisation de la modernité ;
  2. Le « témoignage », vocable à connotation pacifique et respectable, sert à promouvoir l’instauration d’une société régie par les sources scripturaires de l’islam, Coran et Sunna, dans une Europe déchristianisée et sécularisée.

Pour T. Ramadan, Dieu a établi des musulmans sur le Vieux Continent afin de le régénérer dans tous les domaines. Il estime que l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne a un rôle à jouer dans cette mission. « L’islam est une religion européenne de fait, et la Turquie habite culturellement, politiquement et économiquement, son avenir » (Le Monde, 17 avril 2009).

Après l’avoir longtemps soutenu, le Père Christian Delorme, prêtre lyonnais, a écrit à son sujet :

 Je me demande si le discours de Tariq Ramadan, qui déprécie constamment la culture occidentale, va dans le sens d’une réelle intégration des jeunes musulmans » (Le Monde, 29 septembre 2000) ;

Je suis aujourd’hui convaincu, et j’ai mis du temps à le comprendre, que la pensée et l’action de T. Ramadan sont dangereuses […]. Il sait charmer son auditoire, mais en réalité il veut une séparation des musulmans d’avec les autres communautés » (Cité par Lina Murr-Nehmé, Fatwas et caricatures, Salvator, 2015, p. 139).

En 2003, l’universitaire Dominique Avon, qui a analysé l’œuvre de Ramadan, a publié ses conclusions dans la revue Nunc dédiée à l’anthropologie, à la philosophie et à la théologie.

 Son projet consiste à faire émerger un corpus universel (valeurs, devoirs, droits) à partir de la source islamique vouée à se substituer aux notions historiquement formulées en Europe, en Amérique du Nord, à leurs références législatives et juridiques qui les inspirent » (n° 4, octobre 2003).

Pour évaluer l ’opportunité du recours à la taqiya et en doser l’usage, les musulmans sont donc en principe invités à tenir compte des rapports de forces dans les lieux où ils vivent. Selon Marie-Thérèse Urvoy, professeur d’islamologie à l’Institut catholique de Toulouse, la dissimulation 

est connaturelle à l’islam primitif, du vivant du Prophète, et […] les musulmans n’en sont dispensés que lorsqu’ils sont en situation de supériorité, lorsque “Dieu leur donne la puissance” » (Entretiens sur l’islam, avec Louis Garcia, éd. Docteur angélique, 2015, p. 54).

Il faut enfin souligner que, face aux horreurs commises par des djihadistes, dont souffrent également d’autres fidèles de l’islam, certains intellectuels, dirigeants politiques et responsables religieux musulmans dénoncent aujourd’hui l’utilisation de la taqiya, demandant un examen lucide des textes sacrés sur lesquels se fondent les adeptes de la violence (Cf. PFV n° 30-31-32).

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